lundi 11 janvier 2016

Du CES au salon de Detroit : chronique d'une industrie auto qui se réinvente

Quand on voit le nombre d'acteurs qui se pressent au Consumer Electronics Show, et les annonces qui y sont faites, on peut se demander à quoi servent des salons de l'automobile comme celui de Detroit qui ouvre précisément aujourd'hui pour les professionnels. Il est vrai que Ford, GM et Mercedes, pour ne citer qu'eux, ont révélé d'abord à Las Vegas leurs innovations les plus marquantes. Alors, est-ce la fin des rendez-vous traditionnels ?



Cela, seul l'avenir nous le dira. Ce que l'on peut dire, c'est que l'industrie automobile - vomie en France, alors qu'elle reste respectée dans le reste du monde - a une capacité d'adaptation des plus surprenantes. Les mastodontes sont plus réactifs et ne veulent pas devenir des acteurs passifs du changement, comme en témoigne la prise de participation de GM dans le capital de Lyft, le grand rival d'Uber aux USA, pour un montant de 500 millions de $. Le groupe américain, qui fournira des véhicules connectés, entend profiter de ce nouveau business pour tester de nouvelles solutions de mobilité, comme par exemple le véhicule qui se gare tout seul et peut venir jusqu'au conducteur sur simple appel depuis le smartphone.


Le véhicule autonome est le grand sujet du moment. Mais, il faut distinguer les tests de prototypes dans des Etats ensoleillés de l'Ouest Américain et la réalité industrielle. De ce point de vue, Mercedes est à l'aise sur les deux tableaux. Il a fait homologuer sa Classe E dans le Nevada et sort sur le marché dès le printemps prochain le premier véhicule de série semi-autonome. La surprise est toutefois venue de Renault-Nissan qui, profitant du buzz autour du CES, a annoncé depuis son antenne de la Silicon Valley que plus de dix véhicules dotés de la technologie de conduite autonome au cours de ces quatre prochaines années. L’Alliance confirme le lancement d’une gamme de véhicules équipés de capacités autonomes aux Etats-Unis, en Europe, au Japon et en Chine d’ici à 2020. Cette technologie sera déployée en option sur des voitures grand public, à des prix abordables. Premières applications dès cette année avec un assistant qui maintient le véhicule dans sa file sur autoroute, et gère la conduite dans les embouteillages. Le groupe ajoutera le changement de file en 2018 et la gestion automatique des intersections en 2020.


En matière de connectivité, l'industrie automobile n'a pas non plus de complexe par rapport aux acteurs de la Silicon Valley. j'ai déjà parlé ici du procotole Smart Device Link, initié par Ford, et qui intéresse plusieurs acteurs. Ce qu'il faut savoir, c'est que Renault-Nissan avance aussi très vite sur ce sujet. L’Alliance lancera également dans le courant de cette année une nouvelle application pour mobiles permettant une interaction à distance avec le véhicule. Elle sera suivie l'année prochaine par le premier "Système Multimédia de l'Alliance" qui offrira de nouvelles fonctionnalités multimédia et de navigation, optimisera l'intégration avec les smartphones et permettra une mise à jour des données cartographiques en temps réel. En 2018, la "plateforme Connectivité et Internet des Objets de l'Alliance" accueillera le nouvel "Assistant Personnel Virtuel" à destination des particuliers et des entreprises.
Voir l'album photo.

Pour la petite histoire, l'Alliance a recruté l'ancien patron pour l'automobile de HERE, Ogi Redzic, qui sera chargée de mettre en musique les applications et les services de mobilité liés à la voiture connectée.


Du côté de la voiture électrique, le même Renault-Nissan revendique toujours le leadership mondial, avec 300 000 véhicules en cumulé. Toutefois, sa position risque d'être bousculée par Tesla, bien plus innovant et dont les modèles ont plus de sex appeal. D'autre part, le salon de Detroit sera aussi l'occasion de découvrir la nouvelle Chevrolet Bolt, qui a été dévoilée en avant-première au CES. Le nouveau modèle compact électrique de GM revendique une autonomie record de 320 km, grâce à sa batterie de 60 kWh. Le véhicule sera produit fin 2016 et proposé à un tarif de 30 000 $ après les aides du gouvernement américain.

Et il ne faut pas oublier non plus l'hydrogène, porté par Toyota et Honda (et dans une moindre mesure par Hyundai, en attendant les nouveautés d'Audi, Mercedes et Nissan).


En résumé : le CES génère un buzz incroyable, avec des concepts pas forcément réalistes et des start-ups de la French Tech, encensées par les blogs mais qui finiront plus probablement dans le désert que sous les capots, et c'est devenu le nouvel épicentre de la technologie numérique. Par contre, le secteur de l'automobile conserve encore ses codes, dont des salons pour accueillir des passionnés, et surtout des concessionnaires, ce qui reste sa grande force pour le moment.

Les deux vont donc coexister pendant encore quelque temps. On remarque quand même que le salon de Detroit n'a pas Ferrari cette année et se passe également de Bentley, Jaguar-Land Rover, Tesla et même Mini.