jeudi 15 novembre 2012

Comment Michelin prépare la mobilité de demain

Bibendum est un partenaire du congrès Mobilis, auquel j’ai assisté pendant deux jours à Mulhouse, et qui est organisé par le pôle Véhicule du Futur. La firme de Clermont en a profité pour présenter plusieurs innovations, qui permettent de lever un voile sur la stratégie du leader mondial du pneu. Il y avait donc la roue motorisée ou encore la fameuse solution qui équipe la F-City H2 de FAM Automobiles, avec une pile à combustible de 5 kW qui permet de doubler l’autonomie de ce véhicule électrique.



Il ne s’agit pas d’une « simple » pile qui vient en plus de la batterie, mais d’un pack pile + batterie (ramenée à une capacité de 2,4k Wh) qui permet de réduire de moitié le poids des batteries avec un ensemble qui ne pèse plus que 120 kg. L’autre avantage vient du fait qu'il n’est plus du tout nécessaire de recharger la batterie sur une prise de courant, celle-ci étant directement alimentée par le courant électrique fabriqué à bord. Le plein d’un kg d’hydrogène stocké à 350 bars ne prend que quelques minutes.


Une présentation de Pierre Varenne, le « Monsieur hydrogène » de Michelin, a permis de rappeler que les premiers développements dans ce domaine datent de 2004. La première pile à combustible maison (30 kW) avait été embarquée à bord d’un concept car, la Hy-Light. Je m’en souviens très bien, puisque j’avais pu l’époque faire un tour à bord de ce véhicule, à Shanghaï. Bibendum avait alors opté pour la technologie H2/02. Une autre version est apparue trois ans plus tard, avec un poids ramené de 930 à 810 kg et une puissance portée à 40 kW pour une autonomie de 400 km (au lieu de 300 sur un prototype équivalent. La pile développée pour la F-City H2 est d’une toute autre nature, car elle fait appel à la technologie hydrogène/air, mieux adaptée à l’automobile selon les ingénieurs.


Le plus impressionnant est de savoir que Michelin dispose d’un centre de recherche en Suisse, où sont comptabilisées quelque 10 000 heures d’essais par an. Un volume (plus de 24 h par jour de l’année en cumulé) qui témoigne de l’importance accordée à ce nouveau marché. Bibendum maîtrise toute la chaîne, du réservoir d’hydrogène à l’électronique de puissance. Ce savoir-faire dans la pile à combustible s’applique par ailleurs à l’aéronautique (système de génération d’électricité de secours pour l’Airbus A320, validé en vol) et même pour la navigation fluviale (projet YelloH2 de bateau à hydrogène).


Il y a une logique à tout cela, car la pile est le seul moyen de fournir suffisamment d’énergie pour l’Active Wheel, la fameuse roue motorisée qui concentre la propulsion, la suspension et le freinage. La batterie seule ne suffirait pas. Michelin, qui accompagne par ailleurs le développement de la voiture électrique par des pneus adaptés, a donc tout intérêt à favoriser le lancement de la filière hydrogène pour convaincre les constructeurs d’adopter sa solution technique. Rappelons qu’une telle solution permettrait de revoir complètement la conception des futurs véhicules zéro émission.


La firme auvergnate s’intéresse aussi à la voiture connectée. A défaut d’avoir pu devenir un acteur de la cartographie numérique (ses cartes ne sont pas navigables) dans l’automobile, elle est devenue un éditeur de contenus à valeur ajoutée (trafic, guides rouge et vert pour les points d’intérêt). Michelin est par exemple un contributeur majeur des Peugeot Connect Apps de la 208.
 

Michelin regarde même aujourd’hui du côté de la voiture automatisée. Mais là, il s’agit simplement de tester sur le site du centre technique de Ladoux, près de Clermont, des navettes électriques autonomes élaborées par Ligier (projet VIPA : Véhicule Individuel Public Autonome).
Cela montre en tout cas que le manufacturier cherche à appréhender les évolutions de l’automobile, et plus globalement de la mobilité de demain.